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- Analyse verset par verset
v. 1 Jésus leur racontait une histoire inspirée de la vie pour dire quil leur fallait prier en tout temps et ne pas se décourager.
Littéralement: Mais il disait une parabole à eux pour lavoir besoin tout le temps de prier eux et ne pas se décourager,
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il disait une parabole |
Voici une façon typique de Jésus denseigner, en racontant des histoires. Habituellement, ces histoires sont tirées de scènes de la vie quotidienne. Les traductions françaises des évangiles parlent de parabole, mais ce terme est aujourdhui utilisé à toutes les sauces, y compris pour désigner un langage indirect et ambigu, ce qui ne rend pas justice à lintention de Jésus. Les paraboles sont avant tout des comparaisons tirées de la vie ordinaire. En faisant cela, Jésus montre son talent pédagogique.
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il leur fallait prier en tout temps |
Dès le début, nous avons la clé dinterprétation du récit que Jésus sapprête à raconter : il sagit de persévérer dans la prière et de se montrer résilient.
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ne pas se décourager |
Dentrée jeu, on pourrait se demander : pourquoi vouloir parler de persévérance dans la prière? À quel problème veut-on sattaquer? Quel est exactement lenjeu? Est-ce une réponse aux gens qui doutent de la valeur de la prière, parce quils nont pas obtenu ce quils voulaient? Alors Jésus leur dirait : vous navez pas prié assez longtemps. Ça me semble peu probable; cela reviendrait à dire que Dieu est comme un vieillard un peu sourd doreille à qui il faudrait répéter et répéter de plus en plus fort ce quon veut. Ou alors, Dieu serait-il quelquun quil nest pas facile de faire fléchir et quon laurait à lusure? Ça me semble peu probable; cela reviendrait à dire dabord que Dieu peut changer didée, et ensuite quil est comme un être humain quon peut contrôler en étant persistant.
Pour aller plus loin dans notre effort de compréhension de ce qui est en jeu ici, il faut approfondir le sens du mot « ne pas se décourager ». Le terme grec « egkakeô » signifie : faiblir. Cest la seule fois où on trouve ce mot en Luc. Autrement, on le trouve seulement dans les épîtres pauliniennes :
- 2 Corinthiens 4, 1 « Voilà pourquoi, miséricordieusement investis de ce ministère, nous ne faiblissons (egkakeô) pas »
- 2 Corinthiens 4, 16 « Cest pourquoi nous ne faiblissons (egkakeô) pas. Au contraire, même si notre homme extérieur sen va en ruine, notre homme intérieur se renouvelle de jour en jour. »
- Galates 6, 9 « Ne nous lassons (egkakeô) pas de faire le bien; en son temps viendra la récolte, si nous ne nous relâchons pas. »
- Ephésiens 3, 13 « Ainsi, je vous en prie, ne vous laissez pas abattre (egkakeô) par les épreuves que jendure pour vous; elles sont votre gloire! »
- 2 Thessaloniciens 3, 13 « Pour vous, frères, ne vous lassez pas (egkakeô) de faire le bien. »
Les expressions « ne pas se décourager », « ne pas faiblir », « ne pas se lasser », « ne pas se laisser abattre » traduisent toutes la même idée : il sagit de ne pas lâcher, davoir le courage de continuer jusquau bout, de poursuivre son chemin malgré les obstacles, de demeurer ferme et de persister.
Reposons donc la question : Pourquoi cette insistance sur la prière en tout temps et lexigence de ne pas se lasser, de ne pas faiblir, de poursuivre jusquau bout? Éliminons lhypothèse que Dieu a besoin de cette persévérance pour se laisser fléchir, car cela contredirait dautres passages des évangiles (par exemple, Matthieu 6, 8 : « Nallez pas faire comme les païens qui simaginent quen parlant beaucoup ils se feront mieux écouter; car votre Père sait bien ce quil vous faut, avant que vous le lui demandiez. »). Alors pourquoi toujours prier et ne pas se lasser? Si Dieu sait ce dont nous avons besoin avant même que nous ouvrions la bouche, le problème ne serait-il pas chez lêtre humain : si nous nous lassons et nous abandonnons la partie, ne serait-ce pas parce que nous ne voyons rien? Ne serais-pas parce que nous navons pas les yeux de la foi pour voir laction de Dieu? Et avoir les yeux de la foi demande une profonde transformation intérieure qui dure toute la vie.
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v. 2 « Il y avait quelquun qui était juge dans une ville. Il navait pas peur de Dieu et navait dégard pour aucun être humain.
Littéralement : disant: un juge quelconque était dans une ville quelconque Dieu ne craignant pas et envers homme nayant pas dégard.
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v. 3 Or, il y avait également dans cette ville une veuve qui allait le voir en lui disant: "Fais-moi justice face à mon adversaire".
Littéralement : Mais une veuve était dans cette ville-là et elle venait chez lui disant: rends justice à moi contre ladversaire de moi.
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Le récit met en scène deux personnages. Il y a dabord un juge quon présente sous les traits dun homme dur qui ne se laisse pas facilement intimider. On apprend également quil « ne craint pas Dieu ». Quest-ce à dire? Quelquun qui craint Dieu est en fait un être religieux qui se préoccupe dobserver ses commandements. Ainsi donc, le juge serait quelquun qui se fout des lois religieuses et du devoir de compassion. Il y a ensuite une veuve qui a besoin de lui pour régler un litige. Le juge ne veut absolument pas sintéresser à cette cause, sans doute parce quil sagit probablement à la fois dune femme, et donc dune mineure selon la société de lépoque, et dune femme pauvre, comme on peut sy attendre dune femme sans mari. La situation aurait été différente sil sétait sagit dun homme réputé et riche : le juge serait probablement intervenu promptement.
Lhistoire dit que la femme na pas lâché, même si les probabilités de réussir était presquinexistante. Elle a fait preuve de résilience. Cest lattitude de cette femme qui est érigée en modèle. Quant au juge sans coeur et sans principe, il est intervenu pour avoir la paix et retrouver son confort. On sent bien quil y a quelque chose de caricatural dans la figure du juge. Mais cest typique dune parabole dexagérer les traits pour mieux faire comprendre son point. Dans ce cas-ci, le fait de noircir le juge mais davantage en valeur la force de la veuve.
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ekdikēson (rends justice) |
Le terme grec ekdikeô, que nous avons traduit par faire justice, signifie littéralement châtier, punir comme nous pouvons le voir dans dautres passages dont Luc est lauteur :
- Luc 21, 22 « car ce seront des jours de vengeance (ekdikèsis), où devra saccomplir tout ce qui a été écrit »
- Actes 7, 24 « Voyant maltraiter lun deux, Moïse prit sa défense et vengea (ekdikèsis) lopprimé en tuant lÉgyptien. »
- Actes 28, 4 « Quand les indigènes virent la bête (une vipère) suspendue à sa (Paul) main, ils se dirent entre eux: "Pour sûr, cest un assassin que cet homme: il vient déchapper à la mer, et la vengeance (dikè) divine ne lui permet pas de vivre." »
On peut donc assumer quon a fait du tort à la veuve, et celle-ci réclame une forme de châtiment ou de punition.
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v. 4 Mais il ne voulait rien savoir pendant un certain temps. Après quoi il se dit à lui-même : "Jai beau ne pas craindre Dieu ni avoir dégard pour un être humain,
Littéralement : Et il ne voulait pas pour un temps. Mais après ces choses il dit en lui-même : et si le Dieu je ne crains pas ni homme je nai dégard,
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v. 5 mais parce que cette veuve mimportune, je lui ferai justice, afin quà la fin elle ne vienne pas toujours mimportuner." »
Littéralement : du moins à cause du provoquer à moi de souci la veuve celle-là, je rendrai justice à elle, afin quà la fin elle nimportune pas moi.
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v. 6 Le Seigneur dit alors : « Écoutez ce que vient de dire ce juge injuste.
Littéralement : Mais il dit le seigneur (kyrios) : écoutez quoi le juge dinjustice dit.
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kyrios (seigneur) |
La plupart du temps le terme est traduit par : Maître ou monsieur (monsieur provient de « mon seigneur »). Mais dans le monde grec lexpression a servi également à traduire lhébreu Adonai, pour désigner Yahvé, le nom divin quon ne pouvait prononcer. Ainsi parle-t-on du Seigneur pour désigner Dieu dans lAncien Testament. Mais quand un narrateur du Nouveau Testament utilise Seigneur pour parler de Jésus lors de son ministère terrestre, il nous situe carrément après Pâques, dans le monde de la foi, car Jésus appartient désormais au monde de Dieu. Cette façon de parler est unique à Luc :
- Luc 7, 13 « En la voyant, le Seigneur eut pitié delle et lui dit: "Ne pleure pas." »
- Luc 7, 18-19 « Appelant à lui deux de ses disciples, Jean les envoya dire au Seigneur »
- Luc 10, 1 « Après cela, le Seigneur désigna 72 autres et les envoya deux par deux en avant de lui dans toute ville et tout endroit où lui-même devait aller. »
- Luc 10, 39 « Celle-ci avait une soeur appelée Marie, qui, sétant assise aux pieds du Seigneur, écoutait sa parole. »
- Luc 10, 41 « Mais le Seigneur lui répondit: "Marthe, Marthe, tu te soucies et tagites pour beaucoup de choses; »
- Luc 11, 39 « Mais le Seigneur lui dit: "Vous voilà bien, vous, les Pharisiens! Lextérieur de la coupe et du plat, vous le purifiez, alors que votre intérieur à vous est plein de rapine et de méchanceté! »
- Luc 12, 42 « Et le Seigneur dit: "Quel est donc lintendant fidèle, avisé, que le maître établira sur ses gens pour leur donner en temps voulu leur ration de blé? »
- Luc 13, 15 « Mais le Seigneur lui répondit: "Hypocrites! chacun de vous, le sabbat, ne délie-t-il pas de la crèche son boeuf ou son âne pour le mener boire?Luc 17, 5 « Les apôtres dirent au Seigneur: "Augmente en nous la foi." »
- Luc 17, 6 « Le Seigneur dit: "Si vous aviez de la foi comme un grain de sénevé, vous auriez dit au mûrier que voilà: Déracine-toi et va te planter dans la mer, et il vous aurait obéi! »
- Luc 19, 8 « Mais Zachée, debout, dit au Seigneur: »
- Luc 22, 61 « et le Seigneur, se retournant, fixa son regard sur Pierre. Et Pierre se ressouvint de la parole du Seigneur, qui lui avait dit: »
- Luc 24, 3 « mais, étant entrées, elles ne trouvèrent pas le corps du Seigneur Jésus. »
Quest-ce que tout cela veut dire? Nous sommes devant Luc le théologien qui nous présente une catéchèse tirée de la parabole. Même si le tout est mis dans la bouche de Jésus, cest Luc qui parle. Remarquez, cela nenlève rien à la valeur et à linspiration de ce qui est dit.
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v. 7 Et Dieu ne prendrait pas la défense de ses élus qui crient vers lui jour et nuit, alors quil montre sa patience envers eux?
Littéralement : Mais le Dieu ne ferait-il pas la vengeance des élus de lui les criant à lui jour et nuit, et il ne fait pas preuve de patience envers eux?
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Mais Dieu? |
Dans toute parabole, il y a une comparaison : comme... de même que... Or, il y a quelque chose dun peu choquant à comparer Dieu avec un juge sans justice, sans scrupule, sans principe. Cest pourtant ce que nous avons ici : de même quun juge injuste a fini par rendre justice, ainsi Dieu, le juge du ciel, vous rendra justice. On aura compris quici on entend dire : si un juge sans scrupule a pu rendre justice, à plus forte raison le Dieu du ciel, qui est bon, rendra-t-il justice. Quand on parcourt le Nouveau Testament, on note que très souvent les arguments de Jésus pour exhorter les gens à changer de comportement et à bien agir ne sont pas très élevés. Cest comme si Jésus considérait quil est inutile de faire appel au dépassement de soi ou toute forme dutopie, mais faisait appel au gros bon sens, à notre côté pratique et terre à terre, et même à notre propre intérêt pour nous convaincre dune nouvelle façon de faire. Par exemple :
- Si des gens peuvent obtenir ce quils veulent en étant effrontés et sans gêne, cest ce que tu devrais faire quand tu pries (Lc 11, 5-8)
- Pourquoi est-il inutile daccumuler des richesses? Tu vas mourir et un autre aura ces richesses (Lc 12, 15.16-21)
- Tu prends des précautions pour que les voleurs dentrent pas chez toi. Pourquoi ne fais-tu rien face au jugement qui vient? (Lc 12, 39)
- Les gens habiles sarrangent pour se faire beaucoup damis avec des petits cadeaux pour bien planifier leur avenir et les imprévus. Cest ce que tu devrais faire avec ton argent pour avoir de bons appuis dans lau-delà (Lc 16, 1-8)
La parabole elle-même est le reflet de la pédagogie de Jésus qui connaît le coeur humain et ne présuppose pas quil est mu par des motifs nobles. Son art, est de faire découvrir à travers des expériences communes et marquées par nos propres intérêts quelque chose de plus grand, qui est le monde de Dieu. Cest ce que nous fait bien sentir lévangéliste Luc.
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ekdikēsin (vengeance) |
Nous avons traduit lexpression grecque, qui dit littéralement « faire vengeance », par « prendre la défense ». Car on peut deviner quil ne sagit pas de présenter Dieu comme quelquun qui applique le « oeil pour oeil, dent pour dent », mais quelquun qui vient au secours des croyants en prière.
Au v. 7, Luc sinspire de ce texte de lAncien Testament appelé lEcclésiastique ou Siracide 35, 17-23 (je souligne les thèmes communs) :
17 La prière de lhumble pénètre les nuées; tant quelle nest pas arrivée il ne se console pas. 18 Il na de cesse que le Très-Haut nait jeté les yeux sur lui, quil nait fait droit aux justes et rétabli léquité. 19 Et le Seigneur ne tardera pas, il naura pas de patience à leur égard, 20 tant quil naura brisé les reins des violents et tiré vengeance des nations, 21 exterminé la multitude des orgueilleux et brisé le sceptre des injustes, 22 tant quil naura rendu à chacun selon ses oeuvres et jugé les actions humaines selon les coeurs, 23 tant quil naura rendu justice à son peuple et ne laura comblé de joie dans sa miséricorde.
On aura noté les thèmes semblables : il sagit du croyant qui persiste dans la prière tant quil na pas reçu une réponse de Dieu (tant que sa prière nest pas arrivée il ne se console pas... il na de cesse que le Très-Haut nait jeté les yeux sur lui), et cette réponse sera lexercice dune véritable justice de la part de Dieu (quil nait fait droit aux justes et rétabli léquité... tiré vengeance des nations... brisé le sceptre des injustes... tant quil naura rendu justice à son peuple). Le seul point que ne retient pas Luc chez le Siracide concerne limpatience de Dieu; au contraire, il insistera sur la patience de Dieu comme nous le verrons plus bas. Malgré tout, ce texte du Siracide est important, car il nous aide à comprendre ce que lhomme en prière attend de Dieu : il nattend pas un profit personnel ou une guérison quelconque, mais un monde nouveau où la justice règne, où les orgueilleux, les violents et les injustes sont éliminés. Cela sapparente à lutopie moderne dun monde nouveau.
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eklektōn (élus) |
Pourquoi sattarder à lexpression « les élus »? Le mot, utilisé comme substantif pour désigner les croyants, est unique chez Luc et napparaît nulle part ailleurs. Bien sûr, on lutilisera pour désigner Jésus : « celui-ci est mon Fils, lÉlu » (Lc 9, 35); « quil se sauve lui-même, sil est le Christ de Dieu, lÉlu » (Lc 23, 35). Mais jamais au pluriel pour désigner les croyants. Alors il faut se tourner vers les autres évangiles pour y voir un peu plus clair.
- Marc 13, 20 « Et si le Seigneur navait abrégé ces jours, nul naurait eu la vie sauve; mais à cause des élus quil a choisis, il a abrégé ces jours. » (|| Matthieu 24, 22)
- Marc 13, 22 « Il surgira, en effet, des faux Christs et des faux prophètes qui opéreront des signes et des prodiges pour abuser, sil était possible, les élus. » (|| Matthieu 24, 24)
- Marc 13, 27 « Et alors il enverra les anges pour rassembler ses élus, des quatre vents, de lextrémité de la terre à lextrémité du ciel. » (|| Matthieu 24, 31)
Comme nous avons pu le remarquer, le terme « élus » napparaît que dans un contexte apocalyptique de fin des temps et désigne ceux qui survivront au jugement final pour rejoindre le monde de Dieu. Le terme a été introduit par Marc que Matthieu sest contenté de reprendre presque mot à mot. Aussi, il faut donner le même sens au mot « élus » chez Luc, et donc les élus qui prient jour et nuit sont ceux qui attendent le jugement final et le rétablissement de toutes choses dans le monde de Dieu.
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boōntōn (ils crient) |
Le mot « crier » est très peu fréquent. Il est utilisé en deux occasions chez les autres évangiles, lorsquon cite Isaïe, une voix qui crie dans le désert, pour décrire la prédication de Jean Baptiste (Mc 1, 3 || Mt 3, 3 || Lc 3, 4 || Jn 1, 23), et à la croix quand Jésus lance un grand cri avec les mots : « Mon Dieu, mon Dieu, pourquoi mas-tu abandonné? » (Mc 15, 34 || Mt 27, 46). Lexception est chez Luc qui lutilise à trois autres reprises, dans la scène où un homme lance un cri à Jésus pour quil se penche sur son enfant unique qui est épileptique (Lc 9, 38), dans le récit de laveugle de Jéricho qui lance un cri à Jésus pour quil ait pitié de lui, enfin ici dans cette péricope que nous sommes à analyser. Deux points se dégagent de notre analyse. Premièrement, il y a une forme de violence dans ce type de cri; il ne sagit plus dune simple prière de demande, mais plutôt dun immense hurlement. Cette intensité est prolongée par la mention que cette prière est exprimée jour et nuit. Deuxièmement, la fréquence de son utilisation par Luc nous donne lindice que nous sommes devant une composition du troisième évangéliste. Nous lavions mentionné au début avec son utilisation de lexpression Seigneur, mais dautres indices nous conduisent dans la même direction.
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makrothymei (il fait preuve de patience) |
Dans quel sens faut-il interpréter cette patience de Dieu? Dans tous les évangiles, cest la seule fois où on a ce verbe avec Dieu comme sujet. La clé nous est donné par la 2e lettre de Pierre : « Le Seigneur ne retarde pas laccomplissement de ce quil a promis, comme certains laccusent de retard, mais il use de patience (macrothymeô) envers vous, voulant que personne ne périsse, mais que tous arrivent au repentir » (3, 9). Nous avons ici un écho dun problème rencontré par les premières communautés chrétiennes : Jésus avait promis la venue du Fils de lHomme pour bientôt, et voilà que les choses tardent et les chrétiens simpatientent du retard de la Parousie; lépitre de Pierre dit explicitement que « certains laccusent de retard ». Et comment justifie-t-on ce retard? Ce retard, nous dit Pierre, est un temps « de patience » de la part de Dieu pour donner aux gens le temps de se « repentir » ou de se convertir. Il continue en disant : « Il viendra, le Jour du Seigneur, comme un voleur... quels ne devez-vous pas être par une sainte conduite et par les prières, attendant et hâtant lavènement du Jour de Dieu... Ce sont de nouveaux cieux et une terre nouvelle que nous attendons selon sa promesse, où la justice habitera » (10-13). Nous aurons la même perception chez Paul (voir Rm 2, 4; 9, 22; 1 Tm 1, 16). Ainsi, il faut interpréter le v.7 de Luc dans le même contexte : le retard de la Parousie, donc de ce monde nouveau plein de justice sexplique par le désir de Dieu de donner le temps quil faut aux gens pour évoluer et se laisser transformer.
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v. 8 Je vous assure : il prendra promptement leur défense. Cependant, quand il viendra, le Nouvel Adam trouvera-t-il la foi sur la terre? »
Littéralement : Je dis à vous quil fera la vengeance deux en promptitude (tachei). Toutefois, le fils de lhomme étant venu est-ce quil trouvera la foi sur la terre?
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tachei (promptitude) |
Luc reprend ici le texte du Siracide, présenté plus haut, et qui disait : « Et le Seigneur ne tardera pas... tant quil naura rendu justice à son peuple » (Si 35, 19-23). Dans le Nouveau Testament, lexpression « promptement » appliquée à une action explicite ou implicite de Dieu, se situe toujours dans un contexte apocalyptique de la venue prochaine de la Parousie : « Le Dieu de la paix écrasera bien vite (taxos) Satan sous vos pieds » (Rm 16, 20); « Révélation de Jésus Christ: Dieu la lui donna pour montrer à ses serviteurs ce qui doit arriver bientôt (taxos) » (Ap 1, 1); « le Seigneur Dieu, qui inspire les prophètes, a envoyé son Ange pour montrer à ses serviteurs ce qui doit arriver bientôt (taxos) » (Ap 22, 6). Tout cela confirme que la réponse à la prière des croyants concerne la venue de ce monde nouveau à la fin des temps.
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est-ce quil trouvera la foi sur la terre? |
Nous avons enfin lenjeu de lenseignement de Jésus. Que se passerait-il si les gens perdaient la foi? Bien sûr, il ny aurait pas de changement du côté de Dieu : il a promis dintervenir pour quadvienne le monde nouveau et il est fidèle à ses promesses. Le problème est du côté de lhomme. En ne croyant plus que ce monde viendra, les être humains seraient non seulement incapable de reconnaître larrivée presquimperceptible de ce monde, mais cesseraient dy travailler. Comme il semble que Dieu nagit quà travers les êtres humains, ce monde nouveau risque de ne plus venir. On comprend maintenant tout le sens de la prière : la prière est ce qui nous transforme de jour en jour pour que nous épousions les visées de Dieu; la prière est ce qui nous permet de continuer à croire à ce monde nouveau et dy travailler. Bref, la prière concerne moins la demande de choses extérieures à nous, mais plutôt la demande dune transformation de notre être pour travailler à un monde tel que voulu par Dieu. Chaque jour, nous sommes appelés à devenir lhomme nouveau, à lexemple du Nouvel Adam. La prière y joue un rôle fondamental.
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- Analyse de la structure du récit
La structure du récit est très simple.
- Introduction
-Le narrateur explique la raison pour laquelle il raconte lhistoire qui vient : cest une exhortation à prier sans cesse sans se décourager v. 1
- Histoire de la veuve et du juge
-Présentation du juge : un homme qui se fiche de tout le monde v. 2
-Présentation de la veuve : une femme qui se rend régulièrement chez le juge pour avoir gain de cause avec son litige v. 3
-Réaction du juge : exaspéré de la constance de la veuve, il décide de régler laffaire v. 4-5
- Application de cette histoire
-Si un juge injuste a fini par écouter la veuve, à plus forte raison Dieu soutiendra ceux qui sont destinés au monde qui vient, pendant cette période de préparation v. 6-7
- Interpellation
-v.8 Même si le soutien de Dieu est assuré, les élu y croiront-ils jusquà la fin?
- Analyse du contexte
Notre texte appartient à la 2e partie du ministère de Jésus chez Luc qui va de 9, 51 à 19, 28. Cette partie se caractérise par le fait que Jésus se met en route pour Jérusalem et, au cours de cette route, il donne une suite denseignements à ses disciples, avant de mourir. On y trouve beaucoup de matériel propre à Luc, absent chez les autres évangélistes.
Il est très difficile de découper le contexte immédiat, car Luc regroupe artificiellement certaines scènes dont la séquence logique nest pas évidente. Néanmoins, nous proposons le regroupement suivant, encadré par la mention que Jésus est en route vers Jérusalem : Luc 17, 11 18, 34. Nous avons mis en caractère gras certains thèmes communs.
« Or, comme Jésus faisait route vers Jérusalem, il passa à travers la Samarie... » Luc 17, 11
- Guérison des dix lépreux 17, 11-19
- Prière des dix lépreux pour que Jésus aie pitié deux
- Les lépreux sont guéris en chemin vers Jérusalem
- Un seul y reconnaît laction de Dieu et revient vers Jésus
- Pour Jésus, cest la foi qui a transformé ce dernier
- La venue du Règne de Dieu 17, 20-21
- Les Pharisiens posent une question à Jésus sur le moment de la venue du Règne de Dieu
- Réponse de Jésus : ce Règne est déjà à loeuvre
- Le Jour du Fils de lhomme 17, 22-37
- La période qui vient sannonce difficile alors que le Fils de lhomme sapprête à souffrir et à être absent
- Son retour sera imprévisible tout comme le furent les événements entourant Noé et Lot
- Lors de ce retour, il est inutile dessayer de se rendre quelque part, ou de saccrocher à ses affaires et même à sa propre vie : Dieu saura trouver ses élus
Parabole du juge et de la veuve 18, 1-8
- Annonce dune histoire sur limportance de persévérer dans la prière
- Récit dun juge injuste et dune veuve
- Interpellation sur la foi lors de la venue du Fils de lhomme
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- Parabole du Pharisien et du percepteur dimpôts 18, 9-14
- La parabole sadresse à ceux qui simaginent être justes et méprisent les autres
- Récit de deux types de prière, celle du Pharisien et celle du percepteur dimpôt
- Résultat des deux types de prière selon Jésus : seule la prière du percepteur a eu son plein effet devant Dieu
- Lexemple des enfants 18, 15-17
- Les disciples sopposent aux gens qui apportent leur bébé pour que Jésus lui touche
- Jésus les réprimande, car les enfants représentent la seule façon daccueillir le Règne de Dieu
- Renoncer aux richesses pour entrer dans le Royaume 18, 18-30
- Un notable interroge Jésus sur lagir requis pour entrer dans le Royaume
- Jésus résume les commandements du décalogue
- Puis Jésus linvite à laisser toutes ces richesses pour le suivre
- Sadressant aux disciples, il rappelle que quiconque délaissera les richesses à cause du Royaume héritera de la vie éternelle
- Dernière annonce de la passion 18, 31-34
- À lapproche de Jérusalem, Jésus rappelle ce qui lattend : les outrages, la mort et sa résurrection
« Or, comme il approchait de Jéricho... » Luc 18, 35
- Le bloc que nous avons découpé touche à certains thèmes abordés dans la parabole de la veuve et du juge : nous sommes dans un contexte du Règne de Dieu et du retour du fils de lhomme, et on y discute sur la bonne attitude pour sy préparer et accueillir ce Règne, et en particulier sur la prière dans la foi.
- Notre parabole de la veuve et du juge partage un même thème avec lhistoire du Pharisien et du percepteur dimpôt qui suit, celle de la prière, i.e. la bonne façon de prier.
- Quel éclairage jette donc le contexte sur notre parabole? Il nous confirme dans lidée quil faut lire ce récit de Luc dans le contexte du départ imminent de Jésus. Ce dernier chemine vers Jérusalem. Par son enseignement tout au long de ce chemin, il invite ses disciples à vivre à leur tour un certain cheminement et à se préparer à vivre son absence dans la foi. Sils ont vraiment la foi, ils continueront à attendre la venue du Règne de Dieu sans se décourager. Sils ont vraiment la foi, ils sauront quils ont besoin de réorienter chaque jour leur vie comme le percepteur dimpôt, quils doivent se délester de leurs possessions, et quils peuvent compter sur le soutien constant et gratuit de Dieu, à limage des enfants, et ne doivent jamais se décourager comme la veuve.
- Analyse des parallèles
Il nexiste aucun parallèle de cette parabole chez les autres évangiles. Mais au sein même de lévangile selon Luc, il existe une autre parabole qui lui est semblable, i.e. qui porte sur la prière et met en scène quelquun qui insiste pour obtenir ce quil veut : le récit de lhomme effronté. On retrouve même trois expressions identiques qui ont été soulignées.
Lc 11, 5-8 : lami effronté |
Lc 18, 5-8 : la veuve persévérante |
5 Il leur dit encore:
"Si lun de vous, ayant un ami,
sen va le trouver au milieu de la nuit, pour lui dire:
Mon ami, prête-moi trois pains,
6 parce quun de mes amis mest arrivé de voyage
et je nai rien à lui servir,
7 et que de lintérieur lautre réponde:
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2 "Il y avait dans une ville un juge qui ne craignait pas Dieu et navait de considération pour personne.
3 Il y avait aussi dans cette ville une veuve qui venait le trouver, en disant:
Rends-moi justice contre mon adversaire!
4 Il sy refusa longtemps. Après quoi il se dit: |
Ne me cause pas de tracas (grec : parechein moi kopon); maintenant la porte est fermée, et mes enfants et moi sommes au lit; je ne puis me lever pour ten donner;
8 je vous le dis, même sil (grec : ei kai) ne se lève pas pour les lui donner en qualité dami, il se lèvera néanmoins à cause de (grec : dia ge) son impudence et lui donnera tout ce dont il a besoin."
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Même si (grec : ei kai) je ne crains pas Dieu et navoir de considération pour personne,
5 néanmoins, parce que (grec : dia ge) cette veuve me cause des tracas (grec : parechein moi kopon), je vais lui rendre justice, pour quelle ne vienne pas sans fin me rompre la tête."
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- À part les trois expressions identiques, les deux paraboles comportent une réalité semblable : une personne veut obtenir quelque chose dans des circonstances difficiles (au milieu de la nuit auprès de quelquun endormi avec sa famille dans le premier cas, auprès dun juge qui na aucun intérêt pour la justice dans le deuxième cas). Les deux paraboles sont utilisées par Jésus pour établir un argument a fortiori : si des êtres humains finissent pas succomber à la demande, combien plus Dieu répondra aux croyants en prière.
- Ces deux paraboles jumelles propres à Luc proviennent probablement dune même source. Toutes les deux soutiennent limportance de prier, et prier avec audace, sans se lasser. Lévangéliste a inséré ces deux paraboles à deux endroits différents dans cette marche de Jésus vers Jérusalem. Dans le premier cas (11, 5-8), laccent est sur la prière comme écoute de la parole de Dieu (scène de Marthe et Marie qui précède, béatitude « Heureux plutôt ceux qui écoutent la parole de Dieu et lobservent! » qui suit), dans le deuxième cas (18, 1-8) laccent est sur la prière comme soutien dans lattente du retour du Fils de lhomme et dans la réorientation de sa vie pour se préparer au Règne de Dieu qui vient.
- Intention de l'auteur en écrivant ce passage
- Lévangile selon Luc a été écrit probablement autour de lan 80 ou 85, au premier siècle. Cette date est importante pour comprendre notre passage. Car elle se situe à mi-chemin entre la période où lépître aux Corinthiens a été écrite vers lan 56, et la période où la deuxième épître de Pierre a été composée vers lan 125; dans le premier cas, Paul attend pour bientôt le retour du Seigneur (voir 1 Co 15, 51-53), dans le deuxième cas lauteur de la deuxième lettre de Pierre se fait écho des chrétiens qui simpatientent du retard de la Parousie (2 P 3, 9). Ainsi, au cours de cette période où Luc écrit son évangile, lattente du retour du Seigneur est encore présente, mais on perçoit déjà des signes de lassitude. Ainsi, doit-il interpeller les chrétiens qui désespèrent de ce retour du Seigneur (Et il leur disait une parabole sur ce quil leur fallait prier sans cesse et ne pas se décourager 18, 1; Mais le Fils de lhomme, quand il viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre? 18, 8). Il doit expliquer la signification de cette attente si longue en parlant dune période de patience de la part de Dieu pour laisser aux gens le temps de réorienter leur vie et daccueillir lévangile de tout leur être (Et Dieu ne ferait pas justice à ses élus qui crient vers lui jour et nuit, tandis quil patiente à leur sujet! 18, 7). Voilà le cadre dans lequel il faut lire notre passage de Luc pour comprendre son intention.
- Ce passage, comme nous lavons souligné, sinsère dans cette longue marche de Jésus vers Jérusalem où il livre en quelque sorte son testament et prépare ses disciples à sa mort prochaine, et donc à son absence. Comment doivent-ils se comporter alors quil ne sera plus là? Et lun des points que veut aborder Luc est que Dieu continue à agir pendant cette période dabsence, et que cela constitue un moment unique pour les chrétiens pour voir leur vie transformée par lévangile, et ainsi préparer ce monde nouveau annoncé par Jésus. Mais il y une condition à tout ça : les chrétiens doivent continuer à croire à la venue de ce monde nouveau, et prier pour avoir le soutien nécessaire à cette transformation personnelle. Et pour soutenir son point, Luc fait appel à une version dun récit qui pourrait remonter à Jésus où une veuve obtient gain de cause en raison de sa persévérance. Le but est dassurer les chrétiens que Dieu veut ce monde nouveau, et quil soutiendra tous ceux qui sy préparent. Mais construire ce monde prend du temps, et seule la foi nous permet de persévérer malgré ladversité.
- Pour comprendre la perspective de Luc, il faut relire ce passage de la première épître aux Corinthiens (15) alors que Paul évoque la fin des temps. Soulignons ce qui nous intéresse ici :
21 Car, la mort étant venue par un homme, cest par un homme aussi que vient la résurrection des morts. 22 De même en effet que tous meurent en Adam, ainsi tous revivront dans le Christ. 23 Mais chacun à son rang: comme prémices, le Christ, ensuite ceux qui seront au Christ, lors de son Avènement. 24 Puis ce sera la fin, lorsquil remettra la royauté à Dieu le Père, après avoir détruit toute Principauté, Domination et Puissance. 25 Car il faut quil règne jusquà ce quil ait placé tous ses ennemis sous ses pieds. 26 Le dernier ennemi détruit, cest la Mort; 27 car il a tout mis sous ses pieds. Mais lorsquil dira: "Tous est soumis désormais", cest évidemment à lexclusion de Celui qui lui a soumis toutes choses. 28 Et lorsque toutes choses lui auront été soumises, alors le Fils lui-même se soumettra à Celui qui lui a tout soumis, afin que Dieu soit tout en tous.
- Il faut se rappeler que Luc a été le compagnon de Paul. Or, pour Paul, la période que nous vivons en est une de lutte contre les forces du mal. Bien sûr, dans le passage cité, cest Dieu qui mène cette lutte du ciel, mais il faut comprendre quil le fait à travers nous. En citant le psaume 110, 1 (Oracle de Yahvé à mon Seigneur: "Siège à ma droite, tant que jaie fait de tes ennemis lescabeau de tes pieds".), Paul entend décrire la signification du monde présent en attendant la Parousie. On peut penser que Luc partage la même perspective dun combat colossal contre le mal, et cest dans ce sens quil faut interpréter ce temps de la patience de Dieu dont il parle.
- Sil fallait résumer en une phrase lintention de Luc, nous pourrions dire quil sadresse à la communauté chrétienne en disant : pourquoi hésitez-vous à prier et à travailler avec persévérance à ce monde nouveau malgré les obstacles et le fait quil tarde à venir, quand vous savez que Dieu est le premier à le vouloir?
- Situations ou événements actuels dans lesquels on pourrait lire ce texte
- Suggestions provenant des différents symboles du récit
- Le premier symbole est celui de la prière persévérante. Nous pouvons exploiter lidée quil y a des gens qui sont capables de persévérance et de ne jamais lâcher, ce quon appelle aujourdhui des gens résilients qui ont la capacité de rebondir malgré lépreuve. Pourquoi certains lâchent-ils au premier obstacle ou quand le temps sétire, alors que dautres maintiennent le cap sans broncher? Quels sont les facteurs en cause?
- La parabole nous présente deux figures intéressantes dans celle du juge non intéressé par la justice et dune veuve qui se bat sans lâcher. Derrière la figure du juge on peut voir le phénomène de la corruption dans notre monde. Derrière la veuve on peu voir les gens sans moyens financiers et sans appuis sociaux qui nont que leur courage et leur foi pour se battre. Il semble que le temps joue en leur faveur, pourvu quils soient persévérants.
- La comparaison de Dieu avec la parabole soulève une question cruciale : comment pouvons-nous imaginer que Dieu ne vient pas à notre secours? Quest-ce qui nous empêche dy croire ou rend difficile cette foi? Cela pose une autre question : ce que nous désirons est-il ajusté à ce que Dieu veut nous donner? Ne vivons-nous pas la terrible difficulté de voir le monde et notre vie comme Dieu le voit? Ne risquons-nous pas dêtre très déçus tant que notre prière ne reflètera pas Sa manière de voir les choses?
- Lévangile parle du temps de la patience de Dieu. Quelle est notre perception du monde présent? Quel sens donnons-nous à laventure humaine? Quel est exactement notre rôle? Pour Luc, il sagit dun temps où on réoriente sa vie constamment pour sajuster à ce monde nouveau que Dieu prépare.
- Lévangile se termine avec une interpellation sur notre foi. Par définition, croire cest voir linvisible, i.e. voir le monde avec les yeux de Jésus de Nazareth et davoir une confiance totale en ce quil a dit. Où nous situons-nous dans tout ça?
- Suggestions provenant de ce que nous vivons actuellement
Notre réflexion peut être guidée dabord par des événements que nous vivons et sur lesquels nous essayons de projeter le passage évangélique.
- Il se passe peu de semaines où on ne découvre pas des cas de corruption en politique fédérale ou municipale. Il semble que ce soit un phénomène aussi vieux que la prostitution. Que faire? Puisquil y en aura toujours, devons-nous baisser les bras? Pourquoi devrions-nous lutter pour assainir les choses? Lévangile de ce jour peut-il jeter un peu de lumière?
- Le phénomène de limmigration est universel. Plusieurs pays sont confrontés à lintégration de cultures et de religions différentes. Comment respecter la diversité et les droits humains? Comment assurer en même temps lidentité et lintégrité nationale? Sans apporter de réponse, lévangile de ce jour peut-il fournir un cadre de réflexion?
- Comment intervenir devant létat catastrophique dun pays comme la Syrie où le risque de guerre civile est constant, où létat massacre son peuple, mais où les rebelles veulent imposer la sharia avec tout ce que cela veut dire. Lévangile parle de prier sans se décourager? Est-ce là la solution?
- Des couples de notre entourage ont entamé des procédures de séparation, ce qui pave la voie plus tard au divorce. Pour linstant, il nexiste pas de solutions raisonnables à part la prise de distance, même si tous les partenaires sont de bonne volonté. Notre passage dévangile a-t-il quelque chose à dire?
- Les États-Unis connaissent un moment de crise en raison de laffrontement entre partisans dun gouvernement qui prend en charge les plus démunis et ceux pour qui le gouvernement est un monstre quil faut réduire au minimum. Bien sûr, le passage de ce jour ne propose pas de réponse. Mais peut-il offrir un cadre sur la façon daborder la question?
-André Gilbert, Gatineau, octobre 2013
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