Introduction à l'analyse biblique avec la méthode historico-critiqueNotons d’entrée de jeu que la méthode historico-critique dans l’analyste du texte biblique est une approche parmi beaucoup d’autres. Elle a ses forces et ses limites. Par cette présentation, j’entends me centrer sur les éléments de cette méthode qui me permettent à la fin de répondre à la question : qu’est-ce que le rédacteur final voulait dire à la communautaire chrétienne (ou aux communautés chrétiennes) à laquelle il s’adressait en tout premier. Pour moi, cette étape est fondamentale avant de passer à l’autre étape, celle où on se demande : comment cette parole peut-elle jeter une lumière sur les problèmes et les questions actuelles (pour cette étape, on pourra consulter ma proposition sur la façon d’actualiser les évangiles). Car si on veut actualiser par exemple un récit évangélique tout en négligeant l’étape initiale où on cherche à comprendre ce que le rédacteur final voulait dire, on risque de redire simplement son propre univers, sans entrer dans la direction proposée par l’évangéliste. Définissons une méthode comme un schème normatif d'opérations susceptibles d'être reproduites. Dans la méthode historico-critique, il y des opérations distinctes qui cherchent à répondre à des questions distinctes, mais sont en même temps au service d’une même tâche, et donc sont reliées pour former un schème, i.e. qu’on peut répéter indéfiniment à chaque fois qu’on aborde un nouveau texte. On parle de schème normatif, car il y a une façon correcte de faire les choses, et c’est ainsi qu’un exégète peut reprocher à un autre d’avoir mal fait son travail, comme cela se passe dans le monde scientifique. Dans l’expression « historico-critique », il y a deux mots : histoire et critique. Commençons avec le mot « histoire ». Car c’est d’abord un travail d’historien que fait l’exégète, puisque le texte qui est devant lui est âgé de deux mille ans et qu’on cherche à comprendre sa signification. Ainsi, on essaie de retrouver le texte originel (critique textuelle), d’identifier les divers éléments qui composent le texte, leur forme, leur source, leur dépendance à l’Ancien Testament, les traits linguistiques du rédacteur final, la façon dont il se distingue des autres textes de cette époque, le lien entre les thèmes proposés ou les questions posées avec ce qu’on connait de la société de l’époque (sur le sujet, voir la page sur l’herméneutique dans l’Introduction au Nouveau Testament de R.E. Brown que j’ai résumée sur ce site). On utilise également l’expression « critique », car dans ce travail on applique les ressources de la raison dans l’étude des textes, comme le fait l’archéologue dans ses fouilles ou le scientifique dans son laboratoire. Théoriquement, il n’est pas nécessaire que l’exégète soit croyant : il peut détailler l’histoire d’un texte et clarifier l’affirmation de l’auteur final, sans y adhérer; par exemple, il peut conclure que le récit de la pêche miraculeuse de Luc 5 provient de la même tradition que la pêche miraculeuse de Jean 21 et que Jean lui offre un contexte plus plausible en le plaçant après la résurrection de Jésus, même s’il le croit pas en cette résurrection. Dans ce qui suit, j’entends présenter simplement les éléments de la méthode historico-critique les plus importants, que j’utilise dans toutes mes analyses, qui sont à mon avis les plus utiles, qui sont également enseignés dans les facultés de théologie et font partie des critères d’évaluation dans les travaux des étudiants en étude biblique. J’offrirai également certaines techniques pratiques d’analyse et des liens à des outils que je juge très utiles. Dans mon analyse des évangiles, je procède en six étapes.
-André Gilbert, avril 2025
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