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Sommaire
Cette scène de moquerie et de mauvais traitements lors du procès juif autour de Jésus comme prophète est très semblable à celle du procès romain autour de Jésus comme roi des Juifs. Il est possible quil y ait une forme damalgame dans les deux récits. Mais au sein même du procès juif, il y a des divergences dans les récits évangéliques quon ne peut ignorer.
Le récit de Marc, dont dépendent Matthieu et Luc, met laccent sur lironie de la situation, alors quon implique Jésus dans un jeu denfant de lépoque où il doit deviner/prophétiser celui qui la touché, après avoir prophétisé plutôt la destruction du temple et sa reconstruction en trois jours, ainsi que la venue de fils de lhomme dans le ciel ; or, justement, la scène comporte des mots clés du récit du serviteur souffrant dIsaïe 50 (gifles, visage, crachats) dont Jésus est en train de réaliser la prophétie.
Matthieu structure le style un peu trop libre de Marc et en clarifie le contenu : dune part, lallusion au serviteur souffrant est resserré en écrivant en toutes lettres quon lui crache au visage, ce qui loblige en sauter la mention du visage voilé qui devient implicite dans le jeu denfant qui suit ; dautre part, il insère linterpellation de messie dans les moqueries, établissant un lien explicite avec les annonces de la reconstruction du temple et de sa venue dans le ciel qui ont été faites comme messie, et un lien également avec linterpellation de roi des juifs au procès romain.
Luc réarrange tout le matériel si bien que la scène a lieu avant le procès devant le Sanhédrin et dans la cour intérieure du palais où on se chauffait, et les angles sont adoucis : les abus physiques (crachats et gifles) sont éliminés et le rapprochement avec le serviteur souffrant dIsaïe est déplacé vers les Actes des Apôtres et remplacé par le modèle du martyr qui tient ferme dans ladversité. Quant à cette phrase quil partage seulement avec Matthieu (Quel est celui qui ta frappé? ), elle provient sans doute dune tradition orale que les deux évangélistes auraient ajoutée à leur source sans se concerter.
La scène a-t-elle une valeur historique ? Que le Sanhédrin lui-même ait brutalisé Jésus ne lest sans doute pas. Mais on a au premier siècle des précédents où des gardes auraient occasionné des contusions à un accusé.
- Traduction
- Commentaire
- Des comparaisons amenées par les récits évangéliques de la moquerie juives
- Le récit marcien
- Le récit matthéen
- Le récit lucanien
- Analyse
- Traduction
Les passages chez Matthieu, Luc ou Jean qui sont parallèles à Marc sont soulignés. Ce qui est propre à Matthieu et Luc est en couleur bleue.
Marc 14 | Matthieu 26 | Luc 22 | Jean 18 |
65 Et certains commencèrent à cracher sur lui et à couvrir son visage et à le souffleter et à lui dire : « Prophétise! » Et les gardes soccupèrent de lui (avec) des gifles. | 67 Alors ils lui crachèrent au visage et le souffletèrent; mais il y avait ceux qui le giflèrent, disant : « Prophétise pour nous, Messie! Quel est celui qui ta frappé? » | 63 Et les hommes qui le gardaient se moquaient de lui, (le) frappant 64 et, layant couvert, ils linterrogeaient, disant : « Prophétise! Quel est celui qui ta frappé? » 65 Et blasphémant, ils disaient beaucoup dautres (choses) contre lui. | 22 ...un des gardes qui se tenait (là), donna une gifle à Jésus en disant : « (Cest) ainsi (que) tu réponds au grand prêtre? » 23 Jésus lui répondit : « Si jai mal parlé, témoignage de ce qui est mal; mais si (jai) bien (parlé), pourquoi me frappes-tu? » |
- Commentaire
- Des comparaisons amenées par les récits évangéliques des moqueries juives
- Comparaisons entre les scènes juive et romaine des mauvais traitements/moqueries
Les biblistes sont divisés : certains acceptent comme historique à la fois la scène juive des mauvais traitements/moqueries et la scène romaine, dautres refusent complètement les deux, dautres encore acceptent seulement lune delles, plus particulièrement la scène romaine sur laquelle on aurait copié la scène juive. En résumé, les quatre évangiles ont une scène de mauvais traitement avant ou après le procès/interrogatoire juif. Les quatre évangiles ont une scène de moquerie par les soldats romains. Il nest pas impossible que les deux types de scène aient pu être amalgamés.
Tableau de lanalyse du vocabulaire dans les différents récits
| I | II | III | IV | V | VI | |
Vocabulaire | Isaïe 50, 53 | 3e annonce de la passion (Mc 10, 33-34 ; Mt 20, 18-19 ; Lc 18, 31b-33 | Contexte dun procès juif (Mc 14, 64-65 ; Mt 26, 65-68 ; Lc 22, 63-65 ; Jn 18, 22) | Procès devant Hérode (Luc 23, 11 ; Évangile de Pierre 4, 13-14) | Contexte dun procès romain (Mc 15, 15b-20a ; Mt 27, 26b-31a ; Jn 19, 1-3) | Sur la croix (Mc 15, 29-32 ; Mt 27, 39-44 ; Lc 23, 35b-39 ; Évangile de Pierre 4, 13-14) | Commentaire |
#1 blasphēmein, blasphēmia : blasphémer, blasphème | | | Mc/Mt*, Lc** | | | Mc/Mt**, Lc** | * = Jésus accusé de blasphème (aussi Jn10, 33-36 un parallèle à III) ; ** = Jésus blasphème contre |
#2a empaizein : se moquer de | | Mc/Mt, Lc | Lc | Lc | Mc/Mt | Mc/Mt, Lc | |
#2b ekmyktērizein : mépriser | | | | | | Lc | Ps 22, 7 : on se moque du psalmiste abandonné. Ailleurs dans le NT, seulement Lc 16, 14 : les Pharisiens se moquent de Jésus |
#2c oneidizein : insulter | | | | EvPierre | | Mc/Mt | Ps 22, : le psalmiste est lobjet dinsultes ; Mt 5, 11 : « Heureux... quand on vous insultera » |
#2d : hybrizein : traiter avec arrogance | | Lc | | | | | |
#2e exouthenein : traiter avec dédain ou mépris | | | | Lc | | | La forme double de exoudenein dans la version grecque dAquila sur Is 53 ; Ps 22, 7 le psalmiste est objet de mépris ; Mc 9, 12 : « Le Fils de lhomme doit ...être méprisé » |
#3a trechein : pousser (courir) | | | | EvPierre | | | |
#3b syrein : traîner | | | | EvPierre | | | |
#4a phragelloun : flageller | | | | | Mc/Mt | | |
#4b mastigoun, mastizein, mastix : fouetter | √ | Mc/Mt, Lc | | EvPierre | Jn | | √ = Présence du mot en Is 50, 53 |
#4c : paideia, paideyein : châtiment, châtier (fouetter) | √ | | | | | | Lc 23, 16.22 : Pilate offre de châtier Jésus |
#5a derein : battre | | | Lc, Jn | | | | Les serviteurs de la parabole de la vigne (Mc 12, 3.5 et ||) ; dans le synagogues (Mc 13, 9) |
#5b paiein : frapper | | | Mt, Lc | | | | Mc 14, 27 : quelquun de lassistance frappe le serviteur du grand prêtre |
#5c typtein : heurter | | | | | Mc/Mt | | |
#5d kolaphizein : heurter | | | Mc/Mt | | | | |
#5e nyssein : darder, poignarder, transpercer | | | | EvPierre | | Jn | EvPierre avec un roseau ; Jn avec une lance ; Ps 22, 17 : oryssein pour percer les mains et les pieds |
#5f : rapisma, rapizein : gifler | √ | | Mc/Mt, Jn | EvPierre | Jn | | |
#5g emptyein, emptysma : cracher | √ | Mc, Lc | Mc/Mt | EvPierre | Mc/Mt | | |
#6a : kephalē : tête (de Jésus) | | | | EvPierre | Mc/Mt | Mc/Mt | Mc/Mt coup à la tête ; Mt, Jn, EvPierre couronne dépines sur la tête ; Mt inscription au dessus de la tête |
#6b opsis : visage | | | | EvPierre (cracher) | | | |
#6c prosōpon : face | √ | | Mc (couvrir) Mt (cracher) | | | | |
#6d siagōn : joue | √ | | | EvPierre (gifler) | | | |
- Comparaison entre les scènes évangéliques divergentes de la scène juive
Les nombreuses variantes quon trouve dans les textes manuscrits des évangiles témoignent de lémoi des copistes devant tant de divergences, et de leur effort dharmoniser les différences. En effet, Marc écrit : « crache sur lui » et « couvre son visage », alors que Matthieu écrit : « cracha au visage ». Voici la réaction de certains copistes.
- Codex Bezae (Codex Vercellensis vieille version latine, traduction syriaque de la Peshitta, traduction copte bohaïrique) offre pour Marc la recension : crache au visage, et omet : couvre son visage.
- Codex Coridethianus offre la recension suivante de Marc : Quel est celui qui ta frappé?, une harmonisation avec Matthieu et Luc.
Certains biblistes ont voulu réviser la théorie traditionnelle voulant que Matthieu et Luc dépendent de Marc, afin daccommoder ces versions différentes des copistes. Nous ne les suivrons pas sur ce point.
- Le récit marcien
- Qui crache et soufflète Jésus? Daprès le contexte, ce sont les membres du Sanhédrin. Certains biblistes ont affirmé quil est impossible que le Sanhédrin ait eu une attitude si dure. Cest oublier que nous sommes ici devant loeuvre de Marc qui a délibérément présenté dès le début les grands prêtres, les scribes et les anciens comme des gens hostiles à Jésus.
- Lexpression « commencèrent à » est typique du style marcien (26 fois). Laction de cracher exprime le mépris comme on le voit en Job (30, 9-10). Dans lAncien Testament, elle relève de la punition pour quelquun qui est coupable (Nb 12, 14). Et il est possible que cétait le devoir du Sanhédrin dexprimer son mépris pour quelquun condamné à mort.
- Lexpression « et à couvrir son visage » fait probablement référence à un jeu bien connu des lecteurs. Le Onomasticon de Pollux mentionne trois jeux où on couvre les yeux :
- Il y a un jeu du chat-loup où un joueur ferme les yeux et cherche les autres pour les toucher, le défi étant de les identifier sans voir
- Il y a le jeu où un joueur se couvre les yeux avec la main et où il doit deviner avec quelle main quelquun dautre la frappé
- Il y a enfin le jeu où un joueur a les yeux bandés et cherche à trouver les autres alors quon le frappe avec les coquilles de papyrus.
Lanalogie avec ces jeux denfant montre clairement que nous sommes devant une scène burlesque pour mettre au défi la capacité de Jésus à prophétiser. Lironie est quil y a eu deux prophéties de Jésus lors de son procès, celui de reconstruire le temple en trois jours après quil soit détruit, et celui du Fils de lhomme qui vient sur les nuages et assis à la droite de la Puissance, et maintenant il serait incapable de rencontrer les exigences dun jeu denfant. Marc sattend à ce que son auditoire perçoive cette ironie, puisque Jésus a déjà prédit la trahison de Judas et labandon des disciples, ce qui sest réalisé. Lironie est à son comble quand Pierre le renie au milieu du procès, comme Jésus lavait dit, et que le centurion confesse quil est Fils de Dieu lorsquil expire.
- La scène se termine avec les gardes qui le giflent. Il sagit de gardes juifs qui suivent leur maîtres. Pourquoi Marc termine-t-il ainsi cette scène avec des gifles ? En fait, Marc sinspire du serviteur souffrant de Is 50, 6-7 (LXX : « Jai abandonné mon dos aux flagellations, et mes joues aux gifles, et je nai point détourné mon visage de lhumiliation des crachats. Et le Seigneur Maître ma prêté son secours »). Les mots soulignés apparaissent dans le passage de Marc. Cest ainsi que le lecteur aura saisi une autre ironie : Jésus accompli une prophétie du grand prophète Isaïe. Il y a dans le texte de Marc quelque chose dartistique et de théologique.
- Le récit matthéen
- Matthieu ne se gêne pas pour reprendre à sa façon le texte de Marc dont certains éléments semblent lui déplaire, comme lexpression « commencèrent à » quil élimine, sa manière trop libre daccumuler les infinitif (cracher, couvrir, souffleter, dire) quil remplace par des phrases plus équilibrée en regroupant de manière plus logique les divers gestes du Sanhédrin (il distingue deux groupes qui posent chacun deux actions) avant leur prise de parole qui devient le point culminant.
- Pourquoi Matthieu ne reprend-il pas lexpression de Marc « couvrir son visage », mais opte plutôt pour « crachèrent au visage » ? Premièrement, on peut penser quil entend accentuer le parallèle avec le serviteur souffrant dIsaïe où on parle de cracher au visage. Deuxièmement, on comprend bien que, si le visage est voilé, il ne peut plus recevoir de crachat. Troisièmement, puisque son auditoire comprend bien lallusion au jeu denfant qui suit, il nest pas nécessaire de mentionner que le visage de Jésus était voilé.
- Le point le plus saisissant de Matthieu est cette phrase absente de Marc mais présente chez Luc : Quel est celui qui ta frappé? Si Matthieu et Luc écrivent en utilisant tous les deux le texte de Marc, comment peuvent-ils avoir un texte commun alors quils ne se connaissent pas ? Plutôt que dimaginer quun copiste aurait effacé cette phrase de Marc, il est plus simple de penser que nous sommes devant une tradition orale bien connue que Matthieu et Luc auraient à leur façon tous les deux intégrée à leur récit, dautant plus que le jeu denfant auquel on fait référence était bien connu dans lAntiquité. Et il faut souligner le travail pédagogique remarquable de Matthieu qui, après lécho dIsaïe 50, 6 (cracher, visage, gifler), termine la scène avec la demande de prophétiser, une scène qui sera suivie par le reniement de Pierre, confirmant la capacité de Jésus à prophétiser ; il y a quelque chose de dramatique dans cette fin.
- Lexpression « Messie ! », au vocatif (interpellation), est unique dans toute la Bible. Cela accentue le parallèle avec le procès romain on linterpellera sous le titre de « Roi des Juifs ! » (au vocatif). Cest dautant plus unique quon ne possède aucun autre témoignage de quelquun quon aurait désigné sous le titre de « messie » au premier siècle. Pour Matthieu, Jésus est ce messie de la lignée davidique, comme le montre son récit de lenfance. Et cest en tant que messie quil a annoncé la reconstruction du temple et la venue du Fils de lhomme dans les nuages, tout comme Marc. À la différence de Marc, il est beaucoup plus explicite ; et au lieu placer les railleries autour de ce titre lors de la crucifixion, Matthieu préfère les placer ici, accentuant le côté dramatique de la scène, puisquelle sera suivie par le reniement de Pierre, celui-là même qui fut le premier à le reconnaître comme messie.
- Le récit lucanien
- Le cadre de Luc est différent : nous ne sommes plus à la fin dun procès de nuit par les autorités, mais la scène se passe de nuit, après le chant du coq, mais avant le début du procès le matin au Sanhédrin. De plus, le lieu nest plus la salle du Sanhédrin où Jésus est interrogé, mais bien le jardin intérieur du palais (aulē) où on se chauffe auprès du feu, le lieu même où Pierre la renié et où Jésus la regardé pour lui offrir son pardon.
- Il ne faut pas en déduire que Luc aurait bénéficié dune autre source que celle de Marc. On reconnaît plutôt son travail rédactionnel, où il introduit un vocabulaire qui lui est cher, par exemple synechein (se saisir, six fois chez Luc). Et même sil nemploie pas les mêmes mots, cest la même réalité quil décrit : par exemple « hommes » désignent les mêmes personnes que les « gardes » chez Marc et Jean. Il en de même de empaizein (se moquer) qui fait partie des annonces de la passion par Jésus. Chez Marc, la prédiction se réalise lors du procès romain (15, 20) avant dêtre crucifié. Chez Luc, qui veut éviter le mauvais traitement par les Gentils, la prédiction se réalise ici, ainsi que lors de la comparution devant Hérode (23, 11) et en croix (23, 36). Le thème de la moquerie est si dominant que les abus physiques sur la personne de Jésus ne sont plus nécessaires et Luc se permet de les éliminer. Enfin, si Marc a mis dans la bouche du grand prêtre une accusation de blasphème à lencontre de Jésus, Luc refuse de reprendre cette scène où lautorité juive du peuple de Dieu accuserait ainsi le fils de Dieu de blasphémer contre Dieu, une situation impensable ; chez lui le blasphème est plutôt associé à tous ces gestes de moqueries et de mépris à légard de Jésus (Et blasphémant, ils disaient beaucoup dautres (choses) contre lui), une attitude arrogante face à celui qui est le visage de Dieu.
- Il y a cependant des choses qui surprennent chez Luc. Il y a dabord le fait quil élimine les crachats et les gifles du récit de Marc, alors que cétait une façon chez ce dernier dassocier Jésus au serviteur souffrant dIsaïe. Pourquoi ? On doit dabord noter la décision de Luc de déplacer vers le procès dÉtienne dans les Actes (7) une partie du procès de Jésus devant le Sanhédrin, et une référence oblique a lieu dans les Actes au serviteur souffrant avec le récit autour de leunuque éthiopien (8, 26-39). Mais il faut surtout reconnaître que Luc est intéressé par une autre image de Jésus, celui du modèle du martyr qui demeure inébranlable devant les interrogatoires hostiles et les moqueries blasphématoires, un modèle quon trouve dans les livres des Maccabées (2 M 6 7 ; 4 M 6 et 8 14). Ce modèle sera repris dans les Actes des Apôtres avec Étienne, Pierre et Paul.
- Une autre chose surprend chez Luc, le sens quil semble donner à la demande de prophétiser. Car chez Mc/Mt cette demande fait suite à deux prophéties de Jésus lors de son procès, mais chez Luc ne procès na pas encore eu lieu. Pourquoi reprendre cette demande alors que le contexte a changé ? La réponse pourrait être double. Dune part, tout au long de son évangile, Luc a accentué la réputation de Jésus dêtre un prophète (on le salue comme prophète en 7, 16 ; 9, 18.19 ; Jésus se compare aux prophètes en 4, 24.27 ; 13, 33-34), et donc la demande de prophétiser ferait écho à tous ces passages. Dautre part, Luc anticiperait peut-être ce qui sen vient au petit matin, alors que le Sanhédrin lui demandera, sans y croire, sil est messie et fils de Dieu ; il soulignerait avec ironie lincroyance des ennemis alors que la vérité est sur le point déclater.
- Analyse
Discutons maintenant de la question de lhistoricité de cette scène. Rappelons dabord les principaux points de notre analyse.
- La scène du procès juif autour de Jésus comme prophète est très semblable à celle du procès romain autour de Jésus comme roi des Juifs. Mais les détails du contenu varient et il faut éviter la conclusion facile quune scène est simplement une copie de lautre
- Il faut rejeter la conclusion de certains que le récit de Luc est plus historique : il réordonne tout simplement le matériel quil reçoit de Marc
- Le récit de Jean est également marqué par une interprétation théologique, et si la mention dun garde qui gifle Jésus semble faire un écho aux récits synoptiques, il faut plutôt y voir lutilisation de traditions plus anciennes semblables
Quelle est donc la valeur historique du geste dun ou plusieurs gardes qui giflent Jésus et le frappent après son interrogatoire par le grand prêtre la nuit de son arrestation ? Tout dabord, la scène est vraisemblable, puisquun certain Jésus, fils dAnanias, fut arrêté en lan 60 de notre ère par des citoyens de Jérusalem pour avoir annoncé la destruction du temple, et a eu à subir des contusions alors quil demeurait silencieux, avant dêtre remis aux autorités romaines (Josèphe, Guerre juive, 6.5.3, #302). Aussi on peut comprendre que la tradition chrétienne se soit rappelé de cette violence à légard de Jésus et lait associé à la volonté de Dieu exprimée par le serviteur souffrant dIsaïe. Le fait dattribuer cette violence au Sanhédrin de la part de Marc et Matthieu nest probablement pas historique, surtout si, comme on le pense, la rencontre du Sanhédrin a eu lieu quelque temps avant larrestation de Jésus. Ce qui est clair, la tradition chrétienne a voulu exprimer le jugement que, par leur décision, le Sanhédrin était non seulement responsable de la mort de Jésus, mais de tout le mal quon lui a fait.
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